ARTICHAUT I RUBRIQUE
La vie
avec un
quadrupède
Depuis quelques
semaines, nous
avons un chiot.
Notez bien que
notre Jack Russel
n’était pas un
achat impulsif
pour pallier l’ennui
du confinement.
Non, notre famille
débat depuis des
années sur l’achat
d’un compagnon à
quatre pattes. Et
notamment parce
que je suis celle qui
télétravaille et que
mon mari et mon
enfant passent leurs
journées au boulot
et à l’école. C’était
gros comme une
maison : une fois
le chien adopté,
c’est moi qui
allais devoir m’en
occuper. Et n’avaisje pas déjà assez de
responsabilités ?
Mais quand j’ai vu les photos de ce chiot,
mon cœur a bondi de joie et j’ai dit « oui »
avant même d’avoir le temps de douter.
Et la voilà. Notre Molly. La toute mignonne
et douce Molly qui me tient compagnie
pendant que je travaille. Qui, par son beau
regard intelligent, me communique tout ce
qu’elle ressent. Comme par télépathie, je
sens quand il est temps de sortir, d’ouvrir
la porte du jardin pour la laisser jouer
ou de remplir son écuelle. J’ai d’ailleurs
beaucoup réfléchi à son alimentation, car
plusieurs choix s’offraient à moi. Faut-il
nourrir son chien uniquement avec des
croquettes ? Ou est-ce bien d’alterner
avec des aliments humides ? Que faire
avec les restes de table ? Les incorporer
dans sa nourriture ? Ou ne jamais
donner autre chose que des aliments
pour chiens ? Évidemment, j’ai fait mes
recherches et dès le premier jour, je me
suis sentie immensément responsable
de cette nouvelle vie dans la maison.
Tout comme je réfléchis aux repas que je
sers à ma famille - équilibrés, parfois du
poisson, parfois de la viande, beaucoup
de légumes - j’essaie d’élever notre chien
le plus sainement possible. Je remarque
cependant qu’il n’est pas facile de rester
fidèle à ses principes. Uniquement ce qu’il
y a de meilleur, pas de grignotages. C’est
ce qu’il faudrait. Mais quand je cuisine, il
arrive qu’un bout de carotte ou de pain
tombe accidentellement sur le sol et
voilà mon aspirateur vivant qui détecte
en trois secondes l’ingrédient tombé et
l’avale aussi sec. Dans mon supermarché
Alvo, j’étudie le rayon des aliments pour
animaux et j’essaie d’y voir clair. Faut-il
acheter des os au jambon sec ? Est-ce
bon pour ses dents ? Oh, et ces petites
friandises de récompense pour chien !
Comme elles sont mignonnes ! Cela me
demande une grande maîtrise - pire encore
que de renoncer à manger un petit gâteau
Comme par
télépathie,
je sens quand il
est temps de sortir,
d’ouvrir la porte
du jardin pour
la laisser jouer
ou de remplir son
écuelle.
au chocolat - pour ne pas gâter mon chien
avec des tonnes de bonnes choses. Elle a
toujours faim. Ou plutôt : elle a toujours
envie de manger. Comme mon enfant.
Non, ma petite, tu ne peux pas manger un
paquet de chips tous les jours en rentrant
de l’école. Seulement le week-end. Et un
biscuit, c’est assez. Sors ta main du paquet !
Tu veux que je te coupe un kiwi ? Tu veux
que je te prépare un bol de yaourt avec des
rondelles de banane ? C’est pourtant bon !
En guise de remerciement, je récolte un
roulement d’yeux d’adolescent et un soupir
sonore. « Maman, tu ne comprends rien aux
ados. »
Un peu plus tard, le chien vient me gratter
le pantalon. Elle gémit si pitoyablement
qu’on croirait qu’elle a été maltraitée
pendant six longues années. Mais non.
Je me rappelle à l’ordre. La structure
nous maintient sur le droit chemin. De
bonnes croquettes le matin et le soir,
parfois des légumes ou des fruits et de
temps en temps, une friandise pour chien.
Machinalement, j’avale un morceau de
chocolat qui traîne là depuis la SaintNicolas et je continue à travailler.
Des chiens, des enfants et un mari ? Il faut
une volonté de fer pour les mettre au pas
de la santé. Cela mérite bien une petite
douceur de temps en temps.
JANVIER - FÉVRIER 2021 I 65